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Ce que l’on sait du Covid-19

Le Covid-19 n’en finit pas d’étonner le milieu médical alors que le travail de la communauté scientifique internationale permet une avancée plutôt rapide des connaissances sur ce virus atypique. Faisons un point sur ce que nous savons aujourd’hui.

Commençons par poser le contexte : le coronavirus à l’origine de la maladie Covid-19 appartient à la même famille de virus à ARN1 que celui du Syndrome Respiratoire Aigu Sévère, qui avait causé l’épidémie de SRAS en 2003. Ce virus est proche de ceux que l’on peut rencontrer chez des animaux sauvages, comme la chauve-souris, probable réservoir de cette maladie. Il s’agirait donc d’une zoonose, une maladie qui se transmet de l’animal à l’homme. La sévérité de ce virus est variable d’un pays à l’autre. Le taux de mortalité dépend de plusieurs données : l’âge de la population, la capacité des systèmes de santé à prendre en charge les malades, et les dépistages (qui ont été très efficaces en Allemagne).

Les symptômes ont fait revenir de nombreux médecins sur leurs certitudes. Ces premiers symptômes sont la fièvre, la fatigue, et une toux sèche. Dans les cas graves, le virus est connu pour provoquer des syndromes respiratoires aigus sévères (SRAS). Il a été déclaré qu’il s’attaquait principalement aux personnes âgées et aux adultes qui présentaient des facteurs à risque comme le diabète, le surpoids, l’insuffisance cardiaque ou respiratoire, ou encore l’hypertension. Ce virus toucherait plus sévèrement les hommes que les femmes, mais il existe évidemment des exceptions à tous les cas cités précédemment.

Semaine après semaine, la question s’avère être de plus en plus épineuse et les médecins et soignants découvrent des particularités et des complications, sans parler du fait que le virus serait en plus mutant : en effet, trois lignées de SARS-Cov-2 ont déjà été identifiées. D’autres symptômes plus atypiques et aléatoires ont également été reportés : la perte de goût et de l’odorat, la conjonctivite, l’urticaire, et les troubles digestifs. L’hypothèse d’une éventuelle immunité après avoir été guéri du virus est elle aussi tombée à l’eau jusqu’à preuve du contraire.

Les cliniciens se sont également aperçus que dans ses formes graves, la maladie pouvait entraîner une réaction incontrôlable du système immunitaire, que l’on appelle les « tempêtes de cytokine ». En France, un essai prometteur a été mené sur un médicament, le tocilizumab, qui permet justement d’apaiser cette réaction immunitaire qui crée une forme sévère de l’infection.

Beaucoup d’études, qui ne sont pas encore irréfutables, notent aussi un niveau élevé de complications cardiovasculaires parmi les cas graves atteints du Covid-19. Une étude publiée dans la revue américaine JAMA a indiqué des atteintes cardiaques chez 20 % de patients sur 400 hospitalisés à Wuhan.

Un article de Médiapart a révélé une théorie globale et originale, néanmoins intéressante, émise par deux personnes : Sandeep Chakraborty, scientifique et chercheur indien, dont le domaine d’expertise est la biologie numérique, et Bio Moon, un professeur français de SVT.

Sandeep Chakraborty annonce le 3 février sur Twitter qu’il a découvert plusieurs études chinoises qui portent sur le coronavirus, et qui citent toutes la présence élevée de la bactérie Prevotella. Bio Moon, de son côté, émet la même hypothèse sur l’éventuel rôle que pourrait jouer cette bactérie. Le professeur de SVT commence ses recherches sans relâche, et il tombe sur un article de Bruno Lina, virologue et épidémiologiste de renom, membre du Conseil Scientifique. L’article conclut, en somme, qu’une bactérie pouvait influencer très fortement sur l’infection virale respiratoire causée par le virus.

Il apprend ensuite dans un autre article scientifique que certaines bactéries anaérobiques sont plus présentes chez les adultes que chez les enfants, dont la bactérie Prevotella (que l’on retrouve dans les bronches et les poumons, dans la cavité buccale, et dans les intestins). Après ces découvertes, il a l’intuition profonde que cette bactérie jouerait un rôle essentiel dans la maladie, et il finit par tomber sur les travaux de Sandeep Chakraborty.

En effet, le chercheur indien révèle que le Covid-19 aurait un lien direct avec la bactérie Prevotella retrouvée dans de nombreux échantillons de patients. Il ajoute sur son blog que la Chine n’a pas publié l’intégralité du génome qui aurait du faire mention de cette bactérie qu’il a lui même identifiée (et l’aurait peut-être omis volontairement ?). Plus tard, il expliquera que cette bactérie explique en partie les cas de pneumonies graves (et qu’une étude chinoise l’a observé dès fin janvier). 

Cette découverte pourrait être à l’origine d’un bouleversement énorme, voir d’un conflit géopolitique, puisque la Chine saurait depuis le 25 janvier que le Coronavirus est lié à la bactérie Prevotella.

Didier Raoult, un mois après Sandeep, recommande un traitement à base d’antiviraux et d’antibiotiques. 

Cette théorie sur la bactérie Prevotella a été approuvée par des scientifiques du monde entier, et nos deux chercheurs seraient également de potentiels et sérieux candidats au prochain Prix Nobel de Médecine.

Le médecin marseillais Didier Raoult que nous avons cité brièvement et dont nous suivons les recommandations médicales au Maroc, suscite quant à lui la controverse depuis le début de cette pandémie avec son traitement à la chloroquine (médicament très utilisé en Afrique pour traiter le paludisme). Le gouvernement français a d’ailleurs fini par autoriser ce traitement, décision interprétée comme une victoire par Raoult. S’il n’est médiatisé que depuis peu, et parfois moqué, il est loin d’être le « docteur Maboule » que certains voudraient nous dépeindre : directeur de l’IHU de Marseille, infectiologue et microbiologiste de renommée mondiale, cité dans les plus hautes sphères de la recherche médicale, le professeur a une longue réputation et des travaux majeurs derrière lui. C’est à se demander pourquoi il divise autant et déchaîne les passions.  Dans une interview accordée à BFM TV, il a défendu son traitement à l’hydroxycloroquine qui serait à l’origine d’une baisse du taux de mortalité, même s’il a reconnu que « tout était toujours très difficile à prouver ». Il a aussi déclaré qu’une seconde vague de virus relevait d’un scénario de science-fiction.

 Bien que le traitement qu’il ait proposé semble jusqu’ici efficace, des informations qui ont été révélées ont suscité le doute et ont alimenté la controverse. En 2012, la revue Science a affirmé qu’une suspicion de fraude qui datait de 2006 et impliquait un article de l’équipe de Didier Raoult avait poussé lAmerican Society for Microbiology à l’interdire de publication pendant un an. BFM TV, beaucoup plus récemment, a diffusé des témoignages qui accusent le professeur d’agressions verbales, d’autoritarisme, et d’humiliations publiques.

Médiapart (encore eux !) s’est aussi penché sur la question et a voulu comprendre cette défiance générale à l’égard du professeur, et leurs recherches leur ont permis de découvrir des rapports, mais aussi des témoins, qui ont révélé des résultats scientifiques biaisés ainsi que des financements douteux.

À croire que seul l’avenir pourra nous dire qui aura eu raison, qui se sera trompé, qui nous avons bien fait, ou pas, de croire… Ce qui est sûr, c’est que nous n’avons pas fini d’en apprendre sur ce virus, et que ce ne sont pas les derniers mystères dont il est l’objet.